Dominant la rive gauche de la Magel et situé à une altitude de 565 m
sur un escarpement du Burckberg, le Guirbaden est la plus grande
ruine des châteaux d'Alsace.
Une triste histoire
Fondé sur des substructions romaines par Hugues III d'Eguisheim pour
assurer la protection de l'abbaye d'Altdorf, le château des Eguisheim
devait déjà tomber aux mains du Duc de Souabe et d'Alsace, Ernest II, dès
1027.
Il n'allait émerger de ses ruines qu'en 1137 sous le nom de
Guirbadum. Le château n'aura pas à connaître de grande histoire.
Il verra apparaître à deux reprises les Suédois sous ses murs en
septembre et décembre 1632. Ce n'est qu'un an plus tard, le 14 septembre
1633, que la place sera rendue aux Nordiques après avoir été incendiée
par sa garnison. Réparé en 1647 par Frédéric de Rathsamhausen, le château
sera incendié une deuxième fois en 1652 avant d'être impitoyablement rasé
à coups de mines par les Français en 1657. Après sa déchéance, la ruine
reviendra à la famille de Rohan.
Subsistant jusqu'à une hauteur moyenne de trois à quatre mètres, les
enceintes extérieures appareillées en pierres à bossage de grès
enveloppent le noyau de la forteresse, dans laquelle on pénètre par la
grande porte, flanquée de meurtrières.
La clef de voûte de la quatrième porte, aujourd'hui disparue (?), était
armoriée aux armes des Mullenheim et des Uttenheim. Dans la cour
d'honneur se trouvent le puits et des fondations de piliers. A gauche de
la cour d'honneur, dans le logis seigneurial de style roman, fenêtre de plein cintre, chapiteaux
romano-byzantins et cheminées témoignent de la splendeur d'antan.
A droite se tiennent la citadelle et le donjon. Une partie du mur repose sur une
énorme arche en plein cintre enjambant une faille
du rocher. Dans la partie supérieure, cette muraille conserve une fenêtre
romane géminée.
A l'ouest, l'enceinte extérieure entoure une immense esplanade, à
l'extrémité de laquelle se dresse la Tour de la faim, carrée et massive,
avec sa porte surélevée. Au nord, la muraille est flanquée d'une tour semi-cylindrique avec une poterne
romane. Sur l'esplanade, les ruines de la chapelle castrale
Saint-Valentin ont été restaurées au cours de ces dernières années.
Légende : le trésor de Guirbaden
Il y
a longtemps, le château de Guirbaden connut une grande liesse. Les comtes
d'Eguisheim, lorsqu'ils revinrent des croisades, ramenèrent avec eux des
frères du Temple qu'ils installèrent au château. Dès lors, un trésor
gigantesque s'accumula dans les coffres.
Lorsque la persécution du roi anéantit leur ordre en France, ils
laissèrent à Odile, dernière héritière, tant d'or qu'elle était un des
plus beaux partis de France. Mais Odile n'avait pas le goût du mariage.
Très jeune, elle mourut d'une maladie de langueur. Lorsqu'elle sentit que
sa fin approchait, elle ordonna à un vieux serviteur de l'enterrer dans
un caveau profond, près du château. Il devait placer sous son corps la
cassette pleine d'or et de bijoux. Le vieux serviteur obéit. Quand il
mourut à son tour, il révéla à son fils l'emplacement du tombeau. Et
ainsi, au cours des temps, le secret passa de père en fils, mais nul
n'osa jamais commettre le sacrilège de déterrer le prodigieux trésor.
Vint
un jour où il n'y eut pas un, mais deux héritiers du secret, deux
jumeaux, Gertrude et Paul. Peu à peu dans leurs têtes enfiévrées, naquit
le désir de s'approprier le trésor. Un soir, en silence, ils montent
jusqu'au tombeau d'Odile. Tour la nuit, ils creusent dans la terre dure
et leur avidité est telle qu'ils ne sentent pas la fatigue. Déjà ils
devinent la forme du cercueil. Mais voici que le jour se lève.
La
nuit suivante, ils reprennent leur tâche sacrilège. Ils ont réussi à
écarter le cercueil et aperçoivent le coffret. A côté du tombeau, il y a
un grand rocher. Les coups de pic l'ont ébranlé et tout doucement, tout
doucement, il penche et glisse vers la fosse profonde. Il s'abat sur la
tombe dans un grand craquement, qui ébranle tout la montagne, au moment
où Gertrude et Paul triomphants portaient la main sur les bijoux.
Nul
n'a jamais revu les deux jumeaux. Pour l'éternité, ils sont couchés sur
le trésor qui a fait d'eux des sacrilèges.
Bibliographie :
Panneau du Club Vosgien (Section
Strasbourg-Grendelbruch)
Ch.-L. Salch, Dictionnaire des châteaux de l'Alsace médiévale, p. 106